Au Burkina Faso, pays situé en Afrique de l’ouest, le coton nourrit environ 4 millions de personnes. L’or blanc représente plus de 4% du PIB national et contribue à environ 14% des recettes d’exportations du pays (Rapport CCIC). Cependant la transformation est demeurée le parent pauvre de la chaîne de valeur du coton. Bientôt, un complexe textile verra le jour à Sourgou, un peu comme au Bénin.
Si le Burkina Faso est le deuxième plus gros producteur de coton en Afrique derrière le Bénin, ce qui est vendu sur le marché national vient d’ailleurs. Le pays exporte la fibre de coton principalement vers la Chine, pour importer en retour des produits finis (textile, vêtements) du géant d’Asie de l’est. Pékin a su conquérir le marché africain où l’industrie locale souffre de manque d’usines, de volonté politique et de déficit énergétique.
« Au Burkina Faso, le marché intérieur de la fibre de coton est embryonnaire. A peine 3% de la production, environ 10 000 tonnes, fait l’objet de filature industrielle par an notamment par la Filature du Sahel (FILSAH) et les autres artisans de filature », selon le Rapport CCIC, 2023. Le pays a produit 404 000 tonnes de coton graine au cours de la campagne 2022-2023 et a prévu pour la campagne suivante 408 000 tonnes. Une production qui, bien que baissière en 2023, fait école dans la sous-région, classant le Burkina au rang des pionniers.
Sur le continent, un soleil de l’industrialisation semble se lever timidement. Les gouvernants africains affichent de plus en plus une volonté politique de valoriser leurs produits agricoles dont le coton qui constitue le grenier économique de nombreux pays ouest-africains à l’instar du Mali et du Bénin.
Pendant que Bamako s’est accordé en novembre 2022 avec la Chine pour se doter de deux usines de filature, le Bénin, de son côté, mise sur sa fameuse Zone industrielle de Glo-Djigbé. Le pays s’est entendu avec un chef d’entreprise indien qui a installé ses unités de transformation à la GDIZ pour produire des draps de lit, des serviettes, des t-shirts, des pyjama et toute sorte de produits textiles.
Le Burkina mise gros
Le pays des hommes intègres n’entend pas rester en marge de la nouvelle dynamique industrielle engagée dans la sous-région. De mémoire, le manque d’usines de transformation de coton au Burkina a inspiré en 2016 une entrepreneure à créer une première unité (SOFACO-B) à 30 km de la capitale pour fabriquer du coton médical. La transformation locale, encore rudimentaire, est en voie de connaitre un boom significatif. En effet, les autorités de Ouagadougou veulent investir 165 milliards FCFA (272 millions de dollars) dans le secteur. Le fonds devra servir à construire un complexe industriel textile à Sourgou, dans la province du Boulkiemdé.
La réalisation du projet est confiée à la société IRO-TEXBURKINA SA. « La construction de ce complexe textile a pour but de développer la chaine de valeur du coton burkinabé par la fourniture des produits textiles, notamment les fils, les tissus, les vêtements, les produits médicalisés », détaille le Conseil des ministres dans un communiqué. Grâce à ce complexe, le pays pourra transformer par an 20 000 tonnes de fibres de coton conventionnel et biologique. Ce qui constitue une opportunité d’emploi pour les jeunes au chômage. Tout comme au Bénin où plus de mille jeunes sont formés et employés dans les unités ultramodernes de transformation (une de capacité de 20 000 tonnes/an est déjà opérationnelle) dont la capacité totale annuelle est estimée à 40 000 tonnes.
L’énergie, véritable défi
Qui parle d’usine parle d’énergie. Au Burkina Faso, comme dans la plupart des pays de l’Afrique de l’Ouest, l’accès à l’énergie électrique est une denrée rare. En effet, le rapport d’activités 2019 de l’Autorité de régulation du secteur de l’énergie (ARSE) du Burkina Faso, estime en moyenne à 86 heures le temps de coupures d’électricité par client en 2019. Un indice plus élevé que la moyenne enregistrée au Togo et au Bénin par exemple. Encore que dans ces pays, la problématique d’accès à l’énergie électrique reste posée malgré les efforts des autorités pour améliorer les performances.
Dans ce contexte de déficit énergétique, l’émergence de l’industrie locale peut connaître des biais. En fait, une unité de transformation de coton consomme de grandes quantités d’électricité pour alimenter les machines de traitement, les systèmes de ventilation, l’éclairage, etc. En plus du coût de l’énergie, les baisses de tensions et les coupures intempestives pourraient alors tourner au ralenti les usines.
Bien que le Burkina représente 16% de la production énergétique de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa), il lui faut encore faire d’efforts pour limiter sa dépendance énergétique. Le pays dépend encore en partie de ses voisins comme le Ghana et la Côte d’Ivoire. Il importe respectivement 200 mégawatts et 500 mégawatts de ces pays qui sont en interconnexion avec d’autres Etats de la région. Et avec ces temps de canicule, la demande croissante en énergie dépasse l’offre. En conséquence, on assiste à des coupures répétées. Un effet qui pourrait s’avérer plus grave à l’installation et à l’exploitation des usines de transformation de coton. Ainsi, l’investissement accru dans l’énergie est donc vital pour un Burkina Faso qui veut tirer profit de son coton.
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