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Crise alimentaire et nutritionnelle au Sahel et en Afrique de l’ouest en 2024 : une situation alarmante

Une crise alimentaire et nutritionnelle sévit au Sahel et en Afrique de l’Ouest. C’est la conclusion d’un rapport conjoint du Comité permanent inter-États de lutte contre la sécheresse dans le Sahel (CILSS) et du Réseau d’information sur la sécurité alimentaire (FSIN) pour 2024. Ce document, basé sur des données, dresse aussi un tableau préoccupant pour la période de soudure de juin à août 2024.

Le Cadre harmonisé (CH) de mars 2024 indique que la crise alimentaire aiguë continue de s’aggraver. « Environ 35,3 millions de personnes, soit 9 % de la population analysée, dans 13 pays ont fait face à des niveaux élevés d’insécurité alimentaire aiguë dans la période de mars-mai 2024 ». Sans intervention adéquate, ce chiffre pourrait atteindre 49,5 millions de personnes, soit 12 % de la population analysée, dans 16 pays durant la période de soudure.

Les conflits et l’insécurité persistent comme les principales causes de la détérioration de la sécurité alimentaire. Les régions du Bassin du Lac Tchad, du nord-ouest et du nord-centre du Nigeria, ainsi que la zone des trois frontières du Sahel central, sont particulièrement affectées. Ces conflits provoquent des déplacements massifs et perturbent les activités agricoles, pastorales et commerciales.

Impact économique et climatique

Les perturbations économiques, marquées par des marchés volatils, une inflation élevée et des politiques restrictives, aggravent encore la situation. Les prix des denrées alimentaires, notamment du riz importé, du maïs et du sorgho, sont en hausse, limitant l’accès des ménages pauvres à une alimentation adéquate. Par ailleurs, les phénomènes météorologiques extrêmes, tels que les pluies irrégulières et les inondations, ont gravement impacté la production agricole dans plusieurs pays. « En perspective, une baisse saisonnière de l’offre des produits alimentaires locaux est attendue au cours des prochains mois, tandis que la demande restera forte en raison de la période de soudure » a indiqué le rapport.

Déplacements et malnutrition

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Le nombre de personnes par phase de l’insécurité aiguë, période courante (mars–mai 2024) (millions)

Au premier trimestre 2024, environ 8,4 millions de personnes étaient déplacées de force, dont 6,5 millions de déplacés internes et 1,9 million de réfugiés et demandeurs d’asile. La situation nutritionnelle des enfants de moins de 5 ans est particulièrement préoccupante, avec environ 12,6 millions d’enfants souffrant de malnutrition aiguë en 2023. Le constat est beaucoup plus alarmant dans les zones de conflit au Burkina Faso, au Mali, au Niger, au Nigeria et au Tchad. « Environ 12,6 millions d’enfants de moins de 5 ans dans 14 pays souffraient de malnutrition aiguë en 2023, dont 3,2 millions étaient affectés par la forme la plus sévère ».

Insécurité alimentaire aiguë au Bénin

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Le nombre de personnes par phase de l’insécurité aiguë, période projetée (juin–août 2024) (millions)

Le Bénin est confronté à un défi significatif avec l’insécurité alimentaire aiguë, affectant une partie de sa population. La période actuelle de mars à mai 2024 voit « 0,4 million de personnes, soit 6 % de la population analysée, dans les Phases CH 3 à 5 ». Cependant, cette analyse ne couvre que 44 % de la population nationale, indiquant une sous-estimation potentielle par rapport à la même période en 2023, qui a vu « environ 0,5 million de personnes, soit 4 % de la population totale, dans les Phases CH 3 à 5 ».

En regardant la période projetée de juin à août 2024, on s’attend à une diminution à « 0,3 million de personnes, soit 3 % de la population analysée, dans les Phases CH 3 à 5 ». Malgré cette baisse, le pourcentage reste similaire aux chiffres de l’année précédente. Il est important de noter que cette projection couvre « seulement 78 % de la population nationale ».

Malgré un approvisionnement adéquat du marché, « l’accès aux denrées alimentaires de base reste limité dans certaines zones pour les ménages pauvres et très pauvres (PREGEC, mars 2024) ». Entre août 2023 et avril 2024, le Bénin a connu des taux d’inflation alimentaire négatifs. Cependant, les prix des céréales de base, y compris le maïs et le sorgho ainsi que le riz importé, étaient nettement supérieurs à ceux de l’année précédente. En avril, les prix du riz importé ont connu une augmentation annuelle allant jusqu’à « 13 % », tandis que les prix du maïs et du sorgho ont augmenté jusqu’à « 70 % » (FAO, 2024).

La partie nord du Bénin a souffert de séquences sèches,  des attaques de chenilles et de sauterelles ainsi que des cas d’inondation entre juillet et septembre 2023, entraînant des pertes de production. Cependant, ces impacts étaient localisés et mineurs, avec une production céréalière pour la campagne agricole de 2023/2024 (PREGEC, mars 2024). La violence des groupes armés non étatiques dans le nord du pays reste une préoccupation, mais la production céréalière est restée stable.

« Au cours des cinq dernières années, le Bénin a connu des niveaux modérés d’insécurité alimentaire et nutritionnelle », allant de 3 à 6 % de la population analysée estimée dans les Phases CH 3 à 5, sauf pour l’année 2022 quand environ « 1,2 million de personnes étaient affectées » pendant la période pic de mars à mai. En dépassant la marque d’un million de personnes dans les Phases CH 3 à 5, le Bénin a rempli le critère du GRFC pour être considéré comme une crise alimentaire majeure, avec une situation particulièrement sévère dans les régions du Nord.

Le rapport du CILSS et du FSIN souligne une crise alimentaire et nutritionnelle sans précédent au Sahel et en Afrique de l’Ouest. Pour atténuer cette crise, il est impératif de renforcer les mesures de sécurité, de stabiliser les marchés, et de soutenir les systèmes alimentaires locaux. La coopération internationale et les interventions ciblées seront cruciales pour améliorer la résilience des populations face à ces défis multiples.

Auriol HOUDEGBE

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