Alors que la communauté musulmane prépare la fête de la Tabaski, le marché de bétail de la commune de Zè accueille encore peu de visiteurs. Comme tous les ans, ceux qui viennent à compte-goutte se montrent frileux et réticents sur les prix des moutons locaux et se tournent vers ceux importés des pays de l’hinterland. Pour les éleveurs et commerçants béninois habitués à ce scénario, leurs prix sont fixés sur la base de plusieurs paramètres.
À quelque jour de la célébration de la fête de la Tabaski, les clients musulmans tardent à encore se rendre sur le marché de bétail de Zè, principal centre commercial des ruminants dans le département de l’Atlantique. Divisé en deux compartiments, ce marché géré par un comité et des agents de collecte de taxes de la mairie vit par la présence des éleveurs et commerçants de ruminants béninois, mais aussi du Niger, du Burkina Faso, du Mali et du Tchad. La plupart des importateurs n’arrivent sur ce marché qu’a l’approche de la célébration de la Tabaski après avoir élevé leurs moutons pendant un an.
En effet, les préceptes de l’islam indiquent que le choix du mouton à immoler dans le cadre de cette manifestation doit remplir certaines conditions physiques. Il doit être âgé d’au moins un an et être en bon état de santé. Bien qu’attachés aux principes religieux et que la plupart des commerçants du marché s’alignent sur ces prescriptions, les moutons présentent une nette différence en termes de potentiel boucher. La race Djalonké et sahélienne notamment les Bali-Bali se côtoient. Cependant, les moutons des éleveurs locaux, notamment ceux de race sahélienne engraissée présentent une masse de chair plus développée que les moutons des importateurs. Pourtant, l’affluence est beaucoup plus dirigée vers ces derniers.
Face au faible pouvoir d’achat, les moutons locaux engraissés sont délaissés
Dans l‘espace du marché réservé au grand bétail et attribué temporairement aux éleveurs locaux, on compte très peu de clients. Quelques-uns viennent s’enquérir des prix, mais se dirigent finalement vers les importateurs après des négociations infructueuses. « Nous sommes venus chercher des moutons de chez nous, mais tout coute tellement cher. On ne sait pas si c’est le COVID-19, on ne comprend plus rien. », a laissé entendre Akpovi.
En effet, pour s’offrir un mouton engraissé par les éleveurs locaux, il faut débourser entre 150 000 francs et 300 000 francs CFA. Des prix que la plupart des clients trouvent prohibitifs en raison du faible pouvoir d’achat. « J’ai quitté Akpakpa (Cotonou) pensant que je vais trouver moins cher, mais ce n’est pas le cas. J’ai choisi deux moutons, on me dit de payer 280 000 francs CFA. Des moutons qui selon moi ont une valeur de 50 000 francs CFA chacun. » ajoute Lamidi ATAO retrouvé sur le marché de bétail de Zè accompagné de son épouse.
Les raisons de la cherté des moutons expliquées
Après l’achat, le client devra débourser en plus du prix du mouton, les taxes de la maire, les frais de transport et le fourrage pour l’embouche en attendant le jour de l’immolation. Les revendeurs de moutons élevés localement, impuissants, voient leur client s’éloigner vers la concurrence. Là-bas, ils peuvent s’acheter des moutons à partir de 50 000 francs CFA.
Face à cette situation, les éleveurs locaux restent imperturbables, car plusieurs paramètres justifient ces tarifs. « On ne peut pas fixer le même prix que celui qui a quitté directement son pays sans engraisser son animal. En réalité, nos moutons sont différents des autres. Ce sont des moutons importés, mais on a pris le temps de les engraisser. Nous avons le cout de transport et les soins vétérinaires qu’on suit par mois. C’est en fonction de tout cela que nous évaluons nos prix. » explique Soumanou TCHO, revendeur de mouton venu de Ouaké, dans le nord du Bénin. Celui-ci ajoute toutefois qu’en dépit de la tendance des prix, les revendeurs de toute origine trouvent pour leur compte.
En effet, les usagers attendent souvent les deux derniers jours avant la fête pour s’offrir leur mouton. Autrement, les restes d’animaux sont reconduits pour l’année prochaine. Ainsi, peu importe la concurrence et le manque à gagner que cela causera à certains, la Tabaski aura bel et bien lieu.
Méchac AWOKOLOÏTO