Au Bénin, un pays ouest africain plus vulnérable aux changements climatiques, le secteur de l’agriculture, de la sylviculture et des autres utilisations des terres (AFOLU) émet 41,76 % du gaz à effet de serre (GES) de l’ensemble du pays, rapporte le groupe de la Banque mondiale. L’équipe de travail a récemment publié l’édition 2023 de son rapport national sur le climat et le développement.
Selon le document consulté par Agratime, 41,76 % du gaz à effet de serre émis au Bénin sont du fait des activités agricoles. « Les émissions totales de GES du Bénin sont très faibles à l’échelle mondiale, avec environ 32,6 millions de tonnes d’équivalent de dioxyde de carbone (CO2 e), soit 1 tonne de CO2e par habitant en 2021. Ces émissions de GES sont inférieures à la moyenne de l’Afrique subsaharienne, qui est estimée à 3,27 tCO2e par habitant », précise le rapport.
Les émissions de gaz à effet de serre du Bénin sont principalement dues à l’expansion incontrôlée et à la conversion des forêts en terres agricoles. Les experts soulignent aussi la dégradation des forêts à cause de leur exploitation illégale et non durable ainsi que la surexploitation du bois d’œuvre. La production de bois de chauffage et de charbon de bois pour combler les besoins en énergie constitue aussi une autre source majeure de ces émissions.
« Le bois de chauffage traditionnel et le charbon de bois restent les sources dominantes d’énergie, l’accès à l’énergie étant limité dans les zones rurales. », constate le groupe de la Banque mondiale.
Principale cause des changements climatiques d’origine humaine, le dioxyde de carbone dure longtemps dans la nature. Les écosystèmes, notamment les forêts côtières de mangrove, constituent des foyers d’absorption des gaz à effet de serre. Mais l’urbanisation et le développement des infrastructures causent la déforestation qui, à son tour, compromet les écosystèmes dont les forêts côtières de mangrove « capables de stocker plus de carbone que d’autres écosystèmes ».
L’agriculture, principale source de méthane
Au Bénin, l’agriculture émet la majeure partie du méthane, un biogaz issu de la fermentation de matières organiques. Elle représente 2,4 mtCO2e devant les déchets (0,1 mtCO2e) et le changement d’utilisation des terres et de la sylviculture (0,3 mtCO2e). « Les émissions générées par l’agriculture ont doublé entre 1990 et 2015, du fait principalement de la fermentation entérique et de la culture des sols », explique le rapport national sur le développement climatique.
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Les experts notent cependant une diminution de la contribution globale de ces facteurs durant les 25 années de référence. Une baisse totale de 41 % contre 69 % initialement. Du reste, « l’agriculture est la plus grande contributrice aux émissions de méthane et d’oxyde nitreux », martèle le rapport. Ce secteur est directement suivi de celui des transports, « deuxième contributeur aux émissions totales » de GES. Selon le rapport, la contribution de ce dernier secteur aux émissions s’est décuplée depuis 2000.
Des portes de sortie
Face aux effets du changement climatique, il parait impérieux pour les ménages agricoles d’adopter des modèles de production alimentaire durables. Les experts suggèrent à cet effet « l’application de techniques agricoles intelligentes et adaptées au climat, telles que le labour de conservation et l’adoption de cultures résistantes à la sécheresse ». Le ministère de l’agriculture du Bénin dispose d’une stratégie à laquelle il faudra s’arrimer. La production durable passe aussi par l’efficacité des systèmes d’irrigation, la promotion d’infrastructures de collecte d’eau et la mécanisation de l’agriculture. Durant les prochaines décennies, le Bénin entend d’ailleurs mécaniser entièrement son Agriculture. Le président Patrice Talon a martelé cette vision en décembre dernier devant le Parlement.
Par ailleurs, le groupe de la Banque mondiale encourage la mise en place d’actions durables (reboisement, agroforesterie, etc.) visant la restauration et la protection des forêts. En plus d’investir dans la gestion des ressources en eau, la planification d’une gestion durable des villes et des zones côtières constituent également des approches de solutions proposées par l’équipe d’experts pour réduire les émissions de gaz à effet de serre.
Nathalie Picarelli et Manuela Ravina da Silva ont dirigé l’équipe chargée de rédiger le rapport. Ils ont collaboré avec d’autres experts du groupe de la Banque mondiale. Ce groupe comprend différentes organisations dont la Banque internationale pour la reconstruction et le développement (BIRD), l’Association internationale de développement (IDA), la Société financière internationale (IFC) et l’Agence multilatérale de garantie des investissements (MIGA).
« Au cours des 30 prochaines années, le Bénin devra bâtir une économie forte, tirée par le secteur privé, basée sur un capital humain et physique plus important et sur la croissance de la productivité de la main-d’œuvre, qui soit résiliente au changement climatique et évite la dépendance excessive à l’égard du carbone », recommandent entre autres les experts.