La production d’igname au Bénin durant la campagne agricole 2023-2024 s’est établie à 3 321 089 tonnes, contre 3 214 889 tonnes au cours de la campagne 2022-2023, selon les chiffres de la Direction de la Statistique Agricole (DSA). Avec un accroissement de 3,3 %, ce tubercule, très prisé par les Béninois, occupe une place importante sur le marché. À la veille de la fête de l’igname, célébrée le 15 août chaque année, le marché était particulièrement animé.
Notre incursion se fait dans la deuxième ruelle après l’immeuble Mahoulé en partant du parc. En entrant dans le marché, l’agitation est palpable. Le bruit des conversations se mêle au crissement des sandales et des pneus de motos sur le sol poussiéreux. L’air est chargé d’arômes divers, un mélange de terre, de produits frais, et d’épices imprégnant chaque recoin. Le point de vente d’ignames se distingue par ses tas imposants de tubercules, soigneusement empilés. Les tubercules vendus ici proviennent majoritairement de Djougou, Savalou, Dassa, Glazoué, Tchaourou, Parakou, Banté, du Togo et même du Ghana.
L’atmosphère autour du stand est dynamique. Les clients, majoritairement des femmes, scrutent attentivement les ignames, les tâtant pour vérifier leur fermeté, discutant les prix avec un marchand qui, tout en souriant, défend la qualité de sa marchandise. Une fois l’entente trouvée, il faut passer au pesage, suivi du stockage dans des sacs par une équipe de trois ou quatre jeunes. De temps à autre, un véhicule ou un taxi-moto s’approche pour charger une nouvelle cargaison. « Il y a d’abord ceux qui déchargent du camion, puis ceux qui sont là pour vendre. On vend aux clients. Maintenant, il y a ceux qui sont là juste pour mettre ça dans le sac. Et puis, les clients s’en vont », confie Raymond Dossoumou, chargé de vente chez Pascal.
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À Mahoulé, les revendeuses négocient ardemment entre le prix et leur budget. Concertation, négociation, tous les moyens sont mis à profit pour obtenir gain de cause. Certaines d’entre elles se regroupent pour acheter, trier et se partager leurs tubercules. De son côté, Calmette Ayoïto, revendeuse, vient d’acheter un panier de 50 kg. « J’ai pris le laboko à 40 000 FCFA. C’est vraiment cher. L’année passée était mieux, car maintenant, on prend le prix de deux pour acheter un seul kilo », déclare-t-elle, le visage empreint de désolation pour les consommateurs finaux.
Concernant la hausse des prix cette année, les avis sont unanimes : la rareté de la pluie et l’augmentation du prix de l’essence obligent les producteurs et les convoyeurs à augmenter les tarifs pour tenter de compenser les investissements. « La vente d’ignames cette année, ça marche bien. L’année passée, quand le laboko est sorti, on a commencé à 65 000 FCFA. Cette année, on a commencé à 95 000 FCFA, vu qu’il n’y a pas eu assez de pluie. Et encore, les choses sont chères. L’année passée, on a commencé à 38 000 FCFA les 50 kilos, genre le panier. Cette année, on a commencé à 56 000 FCFA », explique Raymond, les mains terreuses, en échangeant rapidement les billets contre les tubercules. On l’appelle affectueusement « l’étudiant ».
« Les clients viennent, mais l’igname est cher. Le 50 kg est à 81 000 FCFA, le 25 kg à 41 000 FCFA. À pareille époque l’an dernier, je vendais le 50 kg à 25 000 FCFA, mais cette année, nous avons démarré à 100 000 avant de redescendre à 81 000 FCFA. Chaque jour, nous prions pour que les gens viennent acheter, car il n’y a pas assez d’argent en ce moment », confie la quinquagénaire Houéfa Victoire Ayassou, dans ce commerce depuis quinze ans.
Depuis le 15 août, date officielle du démarrage de la consommation des ignames, à ce jour, le prix n’a pas changé jusqu’à ce jour, date de mise sous presse de cet article. Ce fait reflète une certaine stabilité malgré les craintes d’une hausse continue.
Chez Pascal, la vente ne connaît pas de répit tout au long de l’année. « Bon, il y a des pauses, mais elles sont imperceptibles. Chaque igname a sa saison. Actuellement, c’est le temps des laboko, les ignames qui sortent en premier. On les vend pendant un mois et demi, puis ça se termine. Ensuite, il y a ofegui, ou Alfred en français, puis amoula, Santana et fokpagou. Quand le laboko finit, on passe à amoula, puis à Santana, et enfin à fokpagou jusqu’à la nouvelle campagne », conclut Raymond.
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