En 2023, au Bénin, 206.167 tonnes de mangues ont été produites contre 86.461 tonnes en 2022 (DSA). Depuis quelques jours, ces fruits ont pris d’assaut les différents marchés. Plusieurs espaces sont aménagés pour la circonstance dans différentes zones afin de servir de point d’approvisionnement pour les marchand(e)s grossistes comme détaillants qui tiennent un commerce en difficultés.
Jeudi 25 avril 2024, à 10 heures, un espace ouvert nous accueille à Godomey Houédonou, après le poste des policiers en quittant le carrefour Togoudo dans l’arrondissement d’Abomey-Calavi. Malgré la chaleur, les revendeuses se rassemblent pour acheter des mangues. Des paniers exposés jonchent le sol et occupent près de 90 % de l’espace.
L’entrée montre une symphonie de couleurs et d’odeurs, avec des montagnes de mangues fraîches soigneusement empilées dans des paniers, créant un spectacle captivant de teintes jaunes, vertes et rouges. Conducteurs de taxis motos, revendeuses et acheteurs se mêlent dans une ambiance animée de 7 heures à 22 heures.
Sur ce stand, les mangues commercialisées proviennent principalement du septentrion, de Glazoué, de Dassa, de Parakou, de Djougou et d’Agonlin. Des variétés telles que Kent, Keitt, Sensation, Osteen et Julie sont soigneusement classées par variété et degré de maturité, protégées par un pagne ou un sachet.
Yolande Kpossé, surnommée la « présidente » du groupe, guide les clients dans leurs choix. Parmi eux, dame Rosiane H., vendeuse de mangues et autres fruits à Houéto, exprime sa préoccupation concernant les prix d’achat.
Elle déclare : « les mangues, l’année dernière c’était mieux mais cette année, ce n’est pas la peine. Le panier qu’on prenait à 3000 – 4000 FCFA, est maintenant à 6000 ou 7000 FCFA. Quand on essaie de négocier avec les convoyeurs, ils nous disent que les voies sont fermées, qu’aucun titan n’est plus là-bas pour ramasser les bagages pour eux. Et donc quand ils tombent sur un J9 [une marque de véhicule], eux ils prennent 2000 à 2500 pour un panier. C’est trop cher selon eux, de même que le prix de transport. Raison pour laquelle, à leur tour, ils viennent nous revendre à un cout élevé »
Non loin, dame Thérèse vient de finir la répartition des mangues de ses clientes. Elle exprime également les mêmes inquiétudes au point d’être dépassée.
« Les mangues sont toujours disponibles au nord. Le problème c’est qu’avec les constructions en cours, ils vont prendre par Porto Novo. Si c’est un bus, c’est mieux. Les fruits nous ont été livrés tout à l’heure par une petite voiture. Le chauffeur a pris plus de 60.000 FCFA avec les taxes pour une petite marchandise alors qu’il ne faisait pas ainsi avant. La dernière fois, la mangue que je devais vendre à 2000 FCFA ou 2500 FCFA, j’ai dû vendre ça à 1000 ou 1200 FCFA à Tokpa, c’est à perte. On ne fait aucun bénéfice, on souffre au contraire. J’ai vu des femmes au marché la dernière fois, j’ai failli pleurer. De gros paniers à 2000f et pourtant il n’y avait pas d’acheteur », a-t-elle confié.
La présidente du groupe va plus loin estimant qu’après l’achat des mangues, trouver un camion est difficile. « Si tu as la chance, quand tu finis d’acheter, tu trouves un camion. Comme ça, les mangues là sont en bon état. Mais quand tu ne trouves pas vite un camion là, c’est une difficulté. Arriver ici aussi, quand les mangues-là ne sont plus en bon état, on rencontre des difficultés pour les vendre ».
Sur le site où la propreté n’est pas négligée, les clients se font désirer. Pendant ce temps, les conducteurs de taxis motos continuent de facturer des montants élevés pour le transport, ce qui augmente les difficultés financières des revendeuses. Chez ces dernières, la conséquence se fait aussitôt ressentir. Deux (2) mangues ordinaires sont vendues par exemple à 100 FCFA quand d’autres variétés sont cédées cinq (5) à 200 FCA. Tout dépend de l’état du fruit, renchérit une revendeuse. Et au moment où le fruit perd sa forme normale, la liquidation s’impose.
« Les conducteurs facturent de gros montants et ce n’est pas la peine, dès qu’on part vendre, on fait des tas de 50 ou 100 ou 200 FCFA, on souffre encore et nous sommes en train de faire constamment des calculs mentaux. Deuxièmement, quand on s’approvisionne, et que le zem veut nous prendre, ils ont fermé la voie de Togoudo pour qu’on puisse traverser, ils ont fermé aussi ce qui est au niveau du marché, celle de l’échangeur également. Ce qui fait que les conducteurs de taxi moto sont obligés d’aller prendre par Saint Daniel puis par l’échangeur avant de tomber sur Itta. Quand c’est comme cela, ils sont obligés de nous taxer », a déclaré dame Rosiane toute triste.
Un conducteur hors micro attribue ces hausses de prix aux blocages de certaines voies en rénovation et à l’augmentation du prix de l’essence.
En plus de ces défis, les commerçantes demeurent impuissantes face à la rapide détérioration de certains fruits par manque de système de conservation adapté. Dame Thérèse bien que confrontée à l’opposition de ses enfants, persiste dans son activité de vente, consciente que c’est grâce à elle qu’elle peut subvenir à ses besoins.
« Mes enfants m’ont déjà demandé de laisser ce commerce et comme je ne peux rien d’abord, j’ai continué », lâche-t-elle en soupirant.
La doléance principale de ces vendeuses de mangues est l’ouverture des routes pour faciliter le transport et réduire les coûts associés.
« Ils n’ont qu’à être indulgents avec nous sur l’affaire des routes barrées. Et revoir aussi les routes bloquées qui empêchent les camions de transporter, de convoyer la marchandise vers nous » a conclu dame Rosiane H.
Non loin de ce point de vente, il y en a un autre à Godomey gare.
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