La Place de l’Étoile Rouge a vibré pendant une semaine au rythme du Made in Bénin. Dans le cadre de la 6ᵉ édition du Mois du Consommons Local, la foire nationale d’exposition-vente des produits locaux a réuni producteurs, transformateurs et artisans venus des quatre coins du pays. Entre fierté, rencontres et réalités économiques, cette édition s’est refermée sur une note partagée : la dynamique est lancée, mais les défis demeurent.
Lancée le 15 octobre 2025 par la ministre de l’industrie et du commerce, Alimatou Shadiya Assouman, la foire de Cotonou marquait l’ouverture officielle du Mois du Consommons Local. Durant sept jours, plus d’une centaine d’exposants ont présenté le meilleur du savoir-faire national : produits agroalimentaires, cosmétiques, textiles, boissons artisanales, objets d’art, et innovations agro-industrielles. Pour l’occasion, la Place de l’Étoile Rouge s’est transformée en un grand marché éphémère. Entre animations, dégustations et démonstrations culinaires, visiteurs et exposants ont partagé une même conviction : le Bénin regorge de talents et de richesses à valoriser. « J’ai vu des Béninois faire des choses extraordinaires », a confié Charbel Gazard, visiteur.
Des stands qui racontent le Bénin productif
Chaque stand avait son histoire. Sèna A., proposait des bonbons au moringa qui lutte contre la toux. D’autres, comme Sahadatou Atta Kakayatchi, la Présidente de l’Union des femmes transformatrices de cajou, ont fait découvrir la marque Alafia Cajou, symbole d’une organisation féminine autour de la valorisation de la pomme de cajou. « Nous avons amené 40 bouteilles de cajou, il ne reste que 7 ! Les visiteurs ont apprécié nos produits. Cette foire nous a permis de rencontrer de nouveaux partenaires qui vont prendre nos produits », a confié la présidente.
Même satisfaction du côté de Bruno Dossa, responsable qualité de l’entreprise « Production Agro-pastorale » basée à Abomey-Calavi. « C’était notre première participation. Nous avons montré qu’au Bénin, on peut produire localement des saucisses, steaks hachés et merguez à partir de porc, de poulet ou de n’importe quelle viande. L’objectif n’était pas seulement de vendre, mais de faire connaître notre savoir-faire. » Les innovations ne se limitaient pas aux produits carnés.
Mayodi Family, une structure basée à Calavi, a présenté des légumes cultivés sans engrais ni pesticides chimiques, en partenariat avec des étudiants de l’université d’Abomey-Calavi. « Notre but est de promouvoir une alimentation saine et locale. Beaucoup ont été surpris qu’on puisse produire ainsi au Bénin », témoigne Yolande Dedjinou, promotrice de Mayodi Family.
Une affluence en demi-teinte mais des rencontres fructueuses
Si la qualité et la diversité des produits ont séduit, plusieurs exposants ont souligné des difficultés logistiques et économiques. « Le public venait nombreux, et ils ont manifesté beaucoup d’intérêts. Mais souvent, après avoir dit qu’ils reviendront, on ne voit plus certains. On se demande si c’est le manque de moyens qui les freine », confie Sahadatou Atta Kakayatchi.
D’un autre côté, « la coupure d’électricité la nuit a posé problème pour la conservation de nos produits frais », regrette Bruno Dossa. Certains évoquent aussi un déficit de communication en amont. Comparativement aux éditions passées, il y a eu moins d’animation et de mobilisation, analyse d’autres. Malgré tout, les contacts commerciaux et partenariats potentiels se sont multipliés.
De nombreux visiteurs, comme Charbel Gaza, entrepreneur, sont repartis impressionnés. Sur le plan des « emballages, le niveau est monté d’un cran. Les produits béninois sont excellents et innovants. J’ai acheté du piment, de l’huile rouge, du steak, et bien d’autres. J’en ai déjà goûté certains, et ils innovent également avec certains produits connus qu’ils améliorent ».
Une foire miroir des défis de la production locale
Cette édition 2025 illustre bien la progression du label “Consommons local”, mais aussi les défis structurels à surmonter : communication à renforcer, infrastructures électriques à fiabiliser, stratégie de vente et de marketing à consolider et surtout, pouvoir d’achat du consommateur à stimuler. Cependant, les points forts sont indéniables : la diversité de l’offre, la qualité croissante des produits, l’implication des jeunes et des femmes, et la synergie public-privé autour de la valorisation du local. Pour rappel, au cours de cette sixième édition, le Gari « Sohoui » de Savalou et l’huile d’arachide « Azimi » d’Agonlin ont officiellement reçu leurs Certificats d’Indication Géographique Protégée (IGP) délivrés par l’Organisation Africaine de la Propriété Intellectuelle (OAPI).
Clôturée le 22 octobre 2025, la foire de Cotonou n’était que la première étape du Mois du Consommons Local. Le flambeau est passé aux départements, où des marchés régionaux prendront le relais jusqu’à la fin du mois. À l’heure du bilan, un constat s’impose : la production locale béninoise gagne en maturité. « En six ans, cette initiative est devenue un véritable mouvement national. Un cri du cœur pour la fierté du Made in Benin. Une invitation à redéfinir nos habitudes de consommation autour de nos propres richesses. La consommation locale n’est pas un mode et ce n’est pas une mode. C’est une nécessité économique et stratégique », rappelait la ministre Shadiya Assouman lors de l’ouverture de la foire.
Avec un accompagnement plus structuré et une communication renforcée, la production locale pourrait devenir un moteur majeur de l’économie nationale. « Pour nous, l’objectif est d’abord d’améliorer la transformation du produit, qu’il s’agisse des jus, des amandes ou de tout ce qui concerne la chaîne de valeur anacarde, en vue des prochaines éditions », renchérit Sahadatou Atta Kakayatchi. Rendez-vous est déjà pris pour la prochaine édition, avec une ambition renouvelée : faire du Made in Bénin une norme reconnue.
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