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Elisabeth Atangana : « La recherche doit répondre à la demande des producteurs »

En marge de l‘Assemblée générale du Coraf, Agratime a eu l’opportunité d’échanger avec Elisabeth Atangana, une représentante engagée des paysans africains. Elle est agro-éleveur et ambassadrice spéciale de la FAO pour les Coopératives, présidente de l’académie de la Plateforme Régionale des Organisations Paysannes d’Afrique Centrale (Propac). Entre défis et espoirs, la présidente de la concertation paysanne au Cameroun partage ses impressions sur la nécessité cruciale de lier recherche et production agricoles pour garantir la sécurité alimentaire et l’autonomie des nations.

Agratime : A l’issue des trois jours de l’Assemblée générale du Coraf, quelles sont vos impressions globales ?

Elisabeth Atangana: Globalement, ce que nous pouvons dire c’est, premièrement, que le besoin de mettre ensemble les producteurs et la recherche est en train de se réaliser progressivement parce que cela a toujours été une demande des paysans de pouvoir travailler avec la recherche. Ceci afin de pouvoir répondre à la demande des producteurs et non l’inverse. Nous nous réjouissons donc de cet espace qui est créé. Ce que nous souhaitons aujourd’hui est que cette demande soit acceptée et que le travail que les producteurs demandent puisse être réalisé pour assurer la sécurité et la souveraineté alimentaires dans notre région.

Vous pensez que les résolutions qui ont été prises au terme des assises sont suffisamment pertinentes pour répondre aux problèmes ?

Elles sont suffisamment pertinentes. D’abord, il faut convaincre les politiques, c’est-à-dire les pouvoirs publics de mobiliser l’argent en faveur de la recherche et la coopération entre la recherche et les organisations paysannes. Le secteur privé peut permettre de renforcer le plaidoyer et de donner une évidence de la nécessité de financer la recherche pour accroître la productivité, pour accroître la production et accroître également l’accès au marché pour que les petits producteurs et les entrepreneurs agricoles puissent vivre décemment.

Alors, pour vous qui représentez les paysans, si on peut le dire ainsi, quels sont les défis que les producteurs agricoles rencontrent ?

Alors, il y a beaucoup de défis. Moi, je suis intervenue sur les crises. Il y a d’abord ces crises, il faut donc plaider auprès des gouvernants pour renforcer la paix dans nos régions, pour éviter les déplacements des populations, par exemple, qui accroissent les coûts de production. Il y a aussi le besoin de rendre autonome un certain nombre de mécanismes d’accompagnement aux petits producteurs, notamment les intrants agricoles, l’accès aux intrants, l’accès à la terre et aussi l’organisation du marché pour assurer des prix justes aux producteurs. Parce que si les producteurs gagnent bien dans leur production, cela va attirer la production, cela va permettre également que l’État puisse assurer la sécurité alimentaire nécessaire pour soutenir la paix durable dans nos pays.

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Sur le plan du financement, les participants à l’AG, ont plaidé pour que les gouvernants financent la recherche agricole par exemple; qu’est-ce que les gouvernements doivent faire concrètement ?

Pour que les gouvernements soient convaincus, il faut que la recherche leur apporte des solutions qui permettent effectivement de créer une valeur ajoutée en termes de productivité, en termes de production, en termes de création de richesses, mais aussi en termes de développement des emplois. Nos jeunes sont en train de partir en Europe parce qu’ils ne trouvent pas un secteur attrayant pour eux, donc il est important aujourd’hui que la recherche présente que si on produit par exemple les pommes de terre, on peut vivre décemment de ces pommes de terre et que le producteur puisse donc continuer à produire pour nourrir la population et que la population ne puisse pas se déplacer, que la population ne puisse pas s’organiser pour entrer dans la rue parce qu’elle a faim, si je le dis de manière aussi simple. Donc les gouvernements ont besoin de mobiliser les ressources, mais il faut convaincre ces politiques que l’agriculture peut avoir une valeur ajoutée et financer la fiscalité, etc.

Vous avez visité des sites pour voir un peu ce que le Bénin fait en matière de recherche agricole, quelle est votre appréciation ?

Nous avons vu beaucoup de résultats, étant donné que la Banque mondiale a beaucoup appuyé aussi le Bénin. Nous félicitons aussi le gouvernement de la République du Bénin d’investir dans le secteur et ça devrait être un exemple pris par tous les pays. Mon pays également fait des efforts, le Cameroun fait des efforts pour le secteur agricole et je crois que cela doit être fait dans toute la région CEDEAO, la région CEEAC. Et maintenant, comment faire en sorte que les produits soient sur l’étal du marché et que ces produits puissent concurrencer le riz qui vient de la Chine, par exemple. Là, il reste encore un défi.

Pour le Cameroun, qu’est-ce qu’il y a lieu de faire après l’AG du Coraf à laquelle vous avez assisté ?

Après l’AG, nous allons restituer ce qui s’est passé ici et nous allons continuer le plaidoyer en direction de nos pouvoirs publics pour financer la recherche afin que nous puissions en bénéficier, pour que les producteurs produisent mieux renforcer la productivité, la production et que la souveraineté alimentaire soit maîtrisée. Je parle bien de souveraineté alimentaire parce que nous devons sortir de la dépendance des importations.

Propos recueillis par Emmanuel M. LOCONON et Auriol HOUDEGBE

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