En Afrique, l’information agricole n’est pas la chose la mieux partagée. La problématique était au cœur d’un webinaire international organisé par le média de référence agricole Agri Digitale le 28 juillet 2023. Journalistes et spécialistes internationaux dissèquent la situation et proposent des approches de solutions.
L’information est un pouvoir, dit-on. Elle aide à prendre des décisions éclairées. C’est le cas dans le secteur agricole où le manque d’informations fiables pourrait être préjudiciable pour l’agriculteur et son activité. Celui-ci a besoin par exemple de connaitre les prix du marché d’engrais, des semences ou des produits agricoles. Il doit avoir une idée sur la météo et les changements climatiques.
« Lorsqu’on parle de l’information agricole, on parle aussi de la spécialisation des journalistes », explique Thierry Djoussi, président de l’association des journalistes camerounais pour l’agriculture et le développement. Mais au Cameroun comme dans beaucoup d’autres pays africains, très peu de journalistes et de médias sont spécialisés dans l’agriculture.
Sur plus de 600 journaux (RSF) présents dans ce pays du golfe de Guinée où près de 60% de la population active vit de l’agriculture (Banque mondiale, 2013), « la presse spécialisée dans l’information agricole, c’est à peine 3% », fait état Thierry Djoussi. Par contre, en Tunisie, l’information agricole est généralement disponible selon Ben Rayyana, docteur en sciences agricoles.
Si la Tunisie semble faire la différence, le pays ne dispose cependant pas d’un nombre suffisant de journalistes agricoles. De même, certaines informations d’ordre stratégique ou confidentiel ne sont pas accessibles. Cette réalité est partagée aussi bien au Libéria, en Afrique du Sud que dans la plupart des pays africains. C’est-à-dire que les défis sont énormes et la responsabilité partagée.
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Subventionner, former, réseauter
Le webinaire de Agri Digitale a porté sur le thème : ‘’Les défis de l’information agricole en Afrique’’. Il s’est penché sur les causes profondes du mauvais état de l’information agricole en Afrique. En effet, les spécialistes pointent du doigt l’intérêt plus accru du public aux informations politiques au détriment de celles agricoles. « L’information agricole ne se vend pas ; elle se vend moins bien que l’information politique », avance Thierry Djoussi. Il en veut pour preuve l’attraction que peut susciter par exemple un coup d’Etat. « Mais quand vous ramenez de la campagne une information selon laquelle la récolte a été très bonne dans telle partie du pays, je ne suis pas sûr que dans les kiosques les gens seront nombreux à se bousculer pour acheter le journal », imagine-t-il.
En conséquence, il faut réinventer l’information agricole en Afrique aujourd’hui, s’accordent les uns et les autres. C’est de « subventionner la presse agricole et l’information agricole ». « Allouer 5% du budget des programmes agricoles à la communication », propose Ben Rayyana. Attendu que faire du journalisme agricole c’est descendre dans les campagnes. Alors que la descente sur le terrain est coûteuse, il faudra « créer un fonds d’aide à l’information agricole », recommande Thierry Djoussi.
Pour Karabo Mabuza, économiste agricole en Afrique du Sud, l’information agricole est vitale autant que le soutien de l’Etat. Les gouvernants doivent accorder plus d’attention au secteur, soutient l’économiste. « Il faut soutenir la presse agricole parce que si l’eau c’est la vie, l’agriculture c’est aussi la vie », lance de son côté Djoussi. En cela, Jefferson Massah, journaliste agricole au Libéria propose une approche mettant l’accent sur le partenariat entre les décideurs des politiques agricoles et les médias.
Les panélistes soulignent aussi la nécessité de former des journalistes polyvalents en agriculture. Ils préconisent une synergie d’actions entre les professionnels des médias spécialisés dans le secteur sur le continent. Par ailleurs, ils voient dans la digitalisation une opportunité pour l’information agricole de parvenir rapidement aux cibles dont les producteurs.
Pregec: Le « Google » de l’information agricole en Afrique de l’Ouest
